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Résidence à Munster : les textes des élèves

Résidence à Munster : les textes des élèves

Voici les deux histoires que nous avons créées lors de la résidence dans la classe de CM1/CM2 bilingue de Mireille Schneider à Munster. Nous avons travaillé ensemble durant six semaines, à raison d’une matinée par semaine, autour de mes albums des Enquêtes écologiques de Jean-Bernard et Miss Turtle (Ah! éditions), dont les élèves se sont inspirés pour créer leurs propres histoires, en alternant les phases individuelles, en petit groupe et collectives.

Déforestation (CM2)

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Dans le bois de Courbelette où l’automne s’installe tranquillement, tout est calme.

—Jean Bernard, vite réveillez-vous ! implore Miss Turtle en accourant aussi vite qu’une tortue peut le faire.

—Qu’est-ce qu’il y a encore, saperlipopette ! grogne le blaireau, qui n’aime pas qu’on le réveille pendant sa sieste.

—Retournez-vous et regardez, lui dit-elle, toute essoufflée.

Un nuage de fumée s’étale au-dessus de la forêt. Les animaux sont terrorisés.

—Voilà Madame Arlette qui revient de ses emplettes, constate Jean-Bernard. Allons lui demander si elle sait ce qui se passe. Après tout, c’est peut-être juste le Père Henri qui fait un barbecue sur sa terrasse !

— Pas du tout ! réplique la belette. Nous avons tous peur, parce que Jeannot le moineau a dit à Christine la fouine qui a dit à Mireille l’abeille que les papillons ont vu des traces de chenilles. 

—Et alors ? s’étonne le blaireau, qui n’a rien compris.

—Aoh, intervient Miss Turtle, je vois de quoi parlent nos amis. Qui dit chenilles, dit machines. Qui dit machines, dit chantier. Ce n’est sûrement rien de bon pour notre forêt.

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Jean-Bernard se précipite pour voir ce qui se passe. Il découvre, horrifié, des bulldozers en train de s’activer.

— Monsieur, Monsieur ! crie-t-il au chef du chantier, vous ne pouvez pas faire une chose pareille !

— Ce n’est pas moi qui décide. Je ne fais qu’obéir aux ordres de mes supérieurs, répond celui-ci.

— Non mais saperlipopette, vous ne voyez pas que vous êtes en train de détruire la forêt ? Vous n’imaginez pas tous les animaux qui y vivent ! 

L’homme ne prend même pas la peine de lui répondre. Les écureuils, outragés, ramassent précipitamment des pommes de pin. Ils grimpent dans les branches, d’où ils  bombardent machines et travailleurs. Sans succès. Les castors abattent quelques arbres pour tenter de faire un barrage, mais c’est un échec : avec leurs engins, les ouvriers déplacent facilement les troncs. Heureusement, l’heure de la pause déjeuner est arrivée. Les taupes en profitent pour boucher les pots d’échappement des machines avec de la terre et de la boue. Cela fonctionne un temps, mais les moteurs finissent par éjecter les bouchons et démarrent en pétaradant. Le chantier reprend.

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Jean Bernard et Miss Turtle réunissent tous les animaux afin de trouver comment faire déguerpir les envahisseurs.

— J’ai une idée, dit Hector le castor. Nous pourrions mettre de la résine sur les sièges des toilettes !

— Saperlipopette, mais c’est n’importe quoi ! râle Jean Bernard. Que vous êtes bête !

— Au contraire, vous êtes un génie, Hector, le contredit Miss Turtle.

Pendant la nuit, les animaux enduisent de résine les poignées des portes et celles des machines, les manettes, les volants ainsi que les deux sièges des toilettes. Les castors utilisent leur queue et les autres, leurs pattes. Les putois et les fouines déposent partout leur adorable odeur. (Mmmmmh !)

Les animaux très contents de leur travail, se dispersent dans le bois de Courbelette. Qu’est-ce que c’était chouette !

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Le lendemain matin, les ouvriers découvrent avec dégoût et horreur l’odeur des toilettes, des machines, ainsi que la résine sur les poignées de portes. Ils vont se plaindre à leur responsable, qui leur ordonne de se mettre au travail sans tarder. Ils obéissent et retournent à leur poste en se bouchant le nez.

Pour attirer le chef de chantier dans un guet-apens, l’écureuil lui vole ses lunettes et saute sur le dos du renard, qui court aussi vite qu’il peut vers une petite prairie.

—Revenez ici tout de suite, hurle celui-ci en se lançant à leur poursuite.

Soudain, une véritable pluie de fientes colorées à la mûre et à la myrtille s’abat sur l’homme et salit sa belle chemise blanche. Les oiseaux ont fait du bon boulot !

—Que vous êtes joli ! se moque le renard, goguenard.

—Je vous aurai, saletés de bestioles ! hurle le chef, furieux, en les menaçant du poing.

En attendant, tous les hommes se remettent au travail : il faudra trouver autre chose.

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Au moment de la pause, comme les clés ont été chapardées par les pies voleuses, les ouvriers sont obligés de casser la serrure de la cabane pour entrer. Cela permet aux crapauds de s’y introduire, portant les limaces et les escargots sur leur dos. Pendant que les ouvriers sirotent une bière, ils se déplacent correctement sur les sandwichs en bavant. Quand les ouvriers veulent déjeuner, ils découvrent avec dégoût leur casse-croûte tout saccagé.

Ils vont alors en ville s’acheter d’autres choses à manger. Pendant ce temps, fourmis et araignées mettent du poil à gratter dans les casques et vestes de chantier. Quelle n’est pas leur surprise quand les ouvriers rassasiés enfilent leurs tenues pour retourner travailler ! Pendant qu’ils se grattent comme des fous, les insectes piqueurs lancent leur offensive. Moustiques, taons, guêpes et frelons attaquent en piqué, sans faire de quartier. Cette fois c’en est trop ! Tous les ouvriers se mettent à hurler et se sauvent jusqu’au dernier. Mais pour combien de temps ?

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Après cette victoire provisoire, Jean Bernard se précipite chez le Père Henri pour lui demander de prêter main-forte aux habitants de la forêt.

—Je vais vous aider, assure le vieil homme. On ne peut quand même pas laisser détruire votre terre et vos maisons, nom d’un champignon ! »

De maison en maison, il parcourt tout le village pour faire signer une pétition. Choqués que l’on abîme la forêt où ils aiment tant se promener, les habitants se mettent en colère. Ils sont prêts à déclarer la guerre aux bulldozers ! Le samedi suivant, ils organisent une grande manifestation de « gilets verts ». Des journalistes, intrigués par ce phénomène leur consacrent un reportage, grâce auquel plusieurs associations de défense de l’environnement s’intéressent à l’affaire. Elles engagent un avocat et saisissent la justice. En attendant le verdict, le chantier est suspendu.

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Le tribunal tranche quelques mois plus tard : pas question de laisser abîmer la forêt et sa belle biodiversité. Quelle magnifique victoire ! Avec l’aide du Père Henri et des « gilets verts » les animaux plantent dans la partie détruite par les bulldozers des arbres offerts par l’association Sauvons la Terre. 

—Aoh, merci de nous avoir soutenus ! lance Miss Turtle aux habitants réunis dans la clairière.

—Nous avons fait du bon travail, saperlipopette, ajoute Jean-Bernard en essuyant ses grosses pattes sur sa salopette.

—Merci à vous de nous avoir rappelé à quel point la forêt est importante, répond le maire du village. Désormais, nous protègerons mieux nos paysages et la faune sauvage, je m’y engage !

Ce soir-là, une grande fête est organisée à la lisière de la forêt, dont le Père Henri est désormais le héros. Tout le monde y participe. Humains et animaux se partagent de délicieux sandwiches… sans limaces ni bave de crapaud !

L’inondation (CM1)

  1. Dans le bois de Courbelette, Jean-Bernard le blaireau se lève pour prendre son petit déjeuner. Il constate, effrayé, qu’il y a de l’eau dans son terrier.

—Saperlipopette ! s’écrie-t-il. Mais qu’est-ce qui se passe ?

En sortant pour se renseigner, il découvre que toute la forêt est inondée et décide d’interroger des témoins pour avoir plus d’informations sur la cause de cette inondation.

  • À quelques pas de là, il rencontre une carpe, qui traverse le chemin à la nage.

—Un coup de vent a fait tomber un arbre dans la rivière, pendant l’orage d’hier soir, explique-t-elle. Un barrage s’est formé et elle a débordé, car une partie de la berge s’est effondrée.

—Oh mince alors ! s’écrie le blaireau. Il faut absolument alerter nos amis de la forêt, surtout ceux qui vivent dans des terriers : ils risquent de se noyer !

Le blaireau rassemble les oiseaux et leur demande de prévenir tout le monde.

  • Sur la rive, Miss Turtle, qui ne sait pas courir mais est partie à point, a déjà mené son enquête et appelé les castors à la rescousse. Quelques jeunes ragondins venus en renfort batifolent dans l’eau. Ils éclaboussent Jean-Bernard, qui râle bien entendu.

—Saperlipopette ! Ce n’est pas le moment de s’amuser. Il y a des animaux à sauver !

Le mulot et la taupe voudraient bien aider à dégager les branchages qui encombrent la rivière, mais ils ne sont pas assez forts, et ne savent pas nager.

  • Castors et ragondins s’activent sur la berge effondrée. Ils démontent le barrage qui s’est formé dans la rivière et utilisent tout le bois ainsi récupéré pour fabriquer une digue bien solide. Dans la clairière, Hubert de la Taupinière, aidé d’une famille de lapins, creuse des rigoles pour que l’eau accumulée puisse s’évacuer vers un lac situé en contrebas de la forêt.

Soudain, Hector le castor se met à crier :

—Noisette ! Noisette a glissé ! Elle est tombée à l’eau ! Venez nous aider ! Vite !

  • La petite écureuille, emportée par le courant, a déjà bu plusieurs fois la tasse. Jean-Bernard, sans perdre une seconde, envoie les oiseaux en reconnaissance pour la repérer parmi les flots tumultueux. Ils cherchent, cherchent, et finissent par découvrir Noisette accrochée à une mince branche qui dépasse de l’eau.

—Au secours, au secours, je vais bientôt lâcher ! implore-t-elle, paniquée.

Les ragondins et les loutres, excellents nageurs, se portent à son secours. Elle est sauvée !

  • ­Alors que tous les animaux rassemblés sur la berge se réjouissent du sauvetage de Noisette, Justine la lapine taquine sent une forte odeur lui chatouiller les narines.

—Eh, tu pues, toi ! lance-t-elle à Éloi le putois. T’as eu un gaz ? Tu devrais profiter de toute cette eau pour te laver, gros naze !

Éloi, vexé et malheureux, s’éloigne en direction de l’amont. Au bout de quelques minutes, il découvre une plaque de bois munie d’une crémaillère et d’une manivelle.

—Une vanne ! s’écrie-t-il.

  • Éloi le putois court chercher le père Henri, qui n’habite pas loin d’ici. Le vieil homme accepte de lui prêter main-forte. En quelques minutes, ils sont de retour sur place et actionnent la manivelle. L’eau s’écoule dans un petit canal, en direction du lac. Le niveau de la rivière baisse. Jean-Bernard et ses copains, qui les ont rejoints, poussent des cris de joie.

—Bravo Éloi ! Nous sommes tous sauvés, grâce à toi !

Ils le portent en triomphe et l’acclament. Justine la lapine lui présente ses excuses : elle sait bien que s’il sent très fort, ce n’est pas parce qu’il ne se lave pas. Son odeur est celle de tous les putois, c’est comme ça. Le Père Henri, accompagné de Jean-Bernard, Miss Turtle et Éloi, se rend à la mairie pour sensibiliser les élus à la question de l’imperméabilisation des sols, qui entraîne une montée des eaux à chaque orage. Ils proposent que les humains cessent de tout bétonner et installent des systèmes de récupération d’eau. La municipalité accepte de s’en occuper. Les animaux sont soulagés : le danger d’une nouvelle inondation sera bientôt écarté.